La pendule du quai 9 3/4 affichait tout juste dix heures quand la famille Greenfield débarqua. Daniel, le fils aîné, avait tenu à arriver très tôt pour que le moins de gens possible le voit avec son père. Par miracle quelques personnes ignoraient encore qu'il était le fils du professeur de métamorphose et il ne tenait pas à l'afficher en public.

- Tu va dans le premier wagon c'est ça ?, demanda-t-il à son père.

- Oui c'est ça. Et toi je suis sûr que tu va te mettre dans le dernier. T'inquiète pas fiston je viendrais pas t'embêter.

Anthony comprenait très bien ce que son fils pouvait ressentir et il ne s'en vexait pas le moins du monde. Au contraire, il préférait lui aussi que leur lien soit ignoré. Moins de personnes le sauraient, mieux ça vaudrait. L'année dernière un élève l'avait accusé de favoritisme et il ne tenait pas à ce que ça recommence. Comme convenu, Daniel dit au revoir à sa mère et sa soeur et partit le premier. Anthony attendit qu'il disparaisse avant d'embrasser sa femme et sa fille chérie. Et dire que dans deux ans ce serait sans tour ! Le temps passait drôlement vite.

Il adressa un dernier signe de main à sa famille puis monta dans le train. A cette heure là il n'y avait presque personne et il n'eut aucun mal à trouver un compartiment vide. Il glissa sa valise sur le porte bagage et s'installa confortablement. Le calme régnait mais plus pour longtemps. Par la vitre il pouvait apercevoir les familles sorcières qui commençaient à affluer. Des parents serraient leur enfants en leur faisant milles recommandations. Ces derniers esquivaient les câlins, gênés que leur amis puissent voir ça. Anthony esquissa un sourire en repensant à son propre départ. Ca lui semblait loin maintenant, tellement loin.

L'air nostalgique, il détacha son regard des élèves excités et sortit un livre de sa pochette : " Animagus non déclaré ". C'était un polar sorcier de Thomas Terond qu'il venait d'acheter à Fleury and Bott. Il avait reçu le prix spécial de littérature sorcière et les critiques étaient plutôt bonnes. Ca l'occuperait pendant une partie du voyage... à moins bien sûr que quelqu'un ne vienne se joindre à lui. Et vu la vitesse à laquelle se remplissait le train, ça ne devait plus tarder.

Julien n’était pas du genre stressé lors des matins de rentrée scolaire. Il se leva de bonne heure, salua sa tante qu’il ne verrait pas pendant un an et sortit dans la rue, sa grosse malle à bout de bras. Le jeune gryffondor marcha tranquillement durant plusieurs mètres puis fit signe à un taxi qui passait par là.

« Vous allez où jeune homme ?
Je me rends à King Cross… Je peux mettre ma malle dans le coffre ? »

Le chauffeur fit une grimace et aida Julien à hisser la malle dans le coffre du taxi. Il s’installa ensuite sur la banquette arrière et observa le trajet d’un air détaché. Il allait entamer une nouvelle année à Poudlard, une nouvelle année où il devrait montrer qu’il n’était pas comme ses parents et qu’il n’avait rien d’un vrai Lestrange. Malheureusement le jeune homme était souvent catalogué à l’annonce de son nom. Il fallait dire que le nom Lestrange était autant craint que détesté.

Quinze minutes plus tard le taxi stoppa sa course et s’arrêta devant la gare. Julien sortit du véhicule, aida le chauffeur à descendre sa malle et régla la note en argent moldu. Heureusement il avait su se débrouiller seul rapidement puisqu’il n’avait jamais vraiment pu compter sur l’amour et l’attention d’une famille soudée.

Julien entra ensuite dans la gare et attendit que le groupe de moldus devant lui se soit éloigné. Là il prit son élan et traversa la barrière magique. Le train était là, comme toutes les années, fidèle pour amener les élèves vers leur seconde maison.

Le gryffondor laissa le soin au chef bagagiste de s’occuper de sa malle. Il s’était déjà suffisamment bousillé le dos à se trimballer ce machin, pas besoin d’en rajouter, et puis le fait que le chef bagagiste soit bâti comme Goliath lui fit oublier tout remords.

Le jeune homme parcourut alors le couloir pas tellement rempli, normal vu que le train ne partait que dans dix minutes. Là la plupart des élèves étaient encore en train de faire leurs adieux à leur famille. Julien termina sa course au bout du couloir et se glissa machinalement dans le compartiment dont la porte n’était pas complètement fermée. Il était occupé par un adulte que Julien connaissait malheureusement, son cher et bien-aimé professeur de métamorphoses.

*Zut si j’avais su ! Va falloir que je me coltine Greenfield pendant tout le trajet !*

« Bonjour professeur, j’espère que vous avez passé d’agréables vacances et que vous avez bien profité pour évacuer le stress acquis l’année dernière ? »

Il tenta d’afficher un regard le plus poli possible, mais il savait que Greenfield ne l’aimait pas à cause de son nom, c’était une intuition. Il n’était tout de même pas aussi nul en métamorphose pour récolter autant de Piètre tout au long de l’année ?!

[HS: Désolée d'avoir mis autant de temps à répondre, j'ai préféré attendre un peu au cas où quelqu'un veuille se joindre à nous]

Anthony avait à peine fini le premier chapitre quand la porte du compartiment s'ouvrit enfin. Le professeur releva la tête en souriant avant de reconnaître la personne qui venait d'entrer. Il s'attendait à n'importe qui sauf à lui... Julien Lestrange. Cet élève de Gryffondor était en sixième année et on ne pouvait pas dire que leur relation était très amicale.

Pourtant le jeune homme n'était ni turbulent, ni impoli, ni paresseux en cours. Il était même plutôt le contraire. Malgré ça Anthony n'arrivait pas à l'aimer et quand ils étaient dans la même pièce il se sentait mal à l'aise. Et pour cause c'était le fils de Bellatrix et Rodolphus Lestrange. Quand on avait des parents comme ça on ne pouvait pas être blanc comme neige, Anthony en était persuadé. Julien cachait sûrement quelque chose sous son masque d'honnêteté et de gentillesse.

Et puis même s'il avait tord, il ne pourrait jamais être en bon terme avec un Lestrange. Non seulement parce que sa famille avait du fuir en 1998 mais aussi parce qu'un de ses amis qui travaillait au ministère avait été torturé par Rabastan Lestrange en 1997. C'était l'oncle de Julien et à chaque fois qu'Anthony croisait le regard du garçon il repensait à cette histoire. Il savait que le jeune homme n'était pas responsable mais c'était plus fort que lui.

Ainsi il se renfrogna quand il comprit qu'il passerait tout le voyage avec Julien. Ce dernier ne semblait pas ravi non plus. Tant pis ils devraient faire avec. Anthony se força à sourire et se promit d'être aussi aimable que possible.

- Bonjour Lestrange.

Sa bouche tressaillit légèrement en prononçant ce nom qu'il haïssait tant. Cependant il s'efforça de ne rien laisser paraître et son visage resta vierge de toute émotion.

- Oui j'en ai bien profité, merci. Rien de mieux qu'un voyage en Italie pour oublier tout ses soucis. Et vous vous avez passé de bonnes vacances ? Prêt à reprendre les cours ?

En temps normal il n'aurait jamais engagé la conversation avec Julien. Néanmoins ils s'apprêtaient à passer deux heures ensemble et il faudrait bien qu'ils s'adressent la parole. S'ils ne le faisaient pas l'ambiance n'en serait que plus pesante. Le professeur esquissa donc un sourire pour détendre l'atmosphère. Puis il pria intérieurement pour qu'une tierce personne se joigne à eux. En attendant il continuerait à faire semblant de rien et se montrerait courtois autant que possible.

Julien ne s’était pas trompé et il le savait ; le professeur de métamorphose avait une dent contre lui et il appartenait désormais au jeune gryffondor de lui prouver le contraire. En fait il avait déjà essayé, mais la haine que Greenfield avait pour ce nom, le fait qu’il soit bourré de préjugés et le fait que Julien soit une bouse en métamorphose n’aidèrent pas le destin.

Le jeune gryffondor jetait des coups d’oeils répétés en direction de la porte du compartiment, comme s’il espérait que quelqu’un entre à nouveau et dissipe la gêne répandue dans les airs. Enfin, pour le moment le professeur de métamorphose et directeur de serpentarde (qui devait donc avoir l’habitude de fréquenter des enfants de mangemort) essayait de paraître courtois.

*C’est ça, fais ton hypocrite, c’est-ce que tu fais de mieux Greenfield !*

« Passé de bonnes vacances ? Non, comme d’habitude. Ma mère étant morte et mon père enfermé je ne les ai pas vu… de toute façon même de leur vivant ils ne se sont jamais intéressés à moi - j’étais devenu une tare pour le nom de Lestrange, surtout quand je fus envoyé à Gryffondor. J’ai toujours pensé que ma mère avait honte de ce que j’étais devenu bien qu’elle ne me l’ai jamais dis en face. Donc j’ai passé toutes mes vacances chez une vieille tante, sourde comme un pot et à moitié aveugle qui passe ses après-midi à dormir dans le salon en poussant d’énormes ronflements ! »

Passé de bonnes vacances ? Soit l’enseignant le faisait exprès soit il était complètement débile ? Il devait bien savoir que Julien n’avait pas une vie facile.

« Sans parler de tous ces gens qui vous ferment la porte au nez dès que vous annoncez votre nom de famille ! Comme si j’y étais pour quelque chose si mes parents ont commis autant de crimes… »

Cette fois-ci il fusilla directement le professeur du regard.

*Calmes-toi Julien, sinon il va être encore plus s*** que l’année dernière !*

« Et sinon vous savez qui va remplacer le professeur Fergus ? »

Le professeur Fergus était le très vieux sorcier qui avait enseigné la défense contre les forces du mal pendant deux ans. Malheureusement sa santé s’étant dégradé il avait du abandonner ses fonctions à quelques mois des examens. Il était donc évident qu’il allait être remplacé cette année, par, espérons-le, un sorcier plus compétent !

Anthony avait fait semblant de s’intéresser aux vacances de Julien par politesse. Il ne s’attendait pas à ce que le jeune homme réponde et encore moi à ce qu’il s’étale sur sa vie. Aussi le professeur grimaça quand l’étudiant parla de sa famille et de ses rapports avec ses parents. Pourquoi est-ce qu’il abordait ce sujet ? Est-ce qu’il essayait de prouver quelque chose ? Parler des Lestrange était la dernière chose au monde qu’il souhaitait et il s’efforça de ne pas répondre. Il fit seulement mine d’être désolée que son été ai été si morne.

Jusqu’à ce que le fils de Bellatrix parle de son nom de famille en le fusillant du regard. Sa voix était on ne peut plus agressive et Anthony comprit tout de suite l’allusion. D’habitude il aimait bien les élèves francs qui disaient ce qu’ils avaient sur leur cœur mais là c’était différent… c’était Julien Lestrange et il ne pouvait rien aimer qui vienne de cet élève. Il trouvait son attitude insolente et il allait vite le remettre à sa place. Le professeur s’apprêta à lui répondre de manière bien sentie mais l’élève fut plus rapide. Il changea de sujet comme s’il avait sentit la menace arriver.

« Et sinon vous savez qui va remplacer le professeur Fergus ? »

Anthony esquissa un sourire mi-agacé, mi-amusé. Il ne perdait rien pour attendre.

- Le professeur Fergus va être remplacé par Mr James Barrie, un ex-auror.

Les deux hommes s’étaient croisés plusieurs fois au ministère quand Anthony y travaillait encore et il avait gardé un bon souvenir de ce sorcier. James serait sûrement un excellent professeur. Sa présence à Poudlard était une bonne chose.

- Mais revenons à ce que vous disiez il y a quelques minutes Mr. Lestrange.

Le professeur avait bien appuyé sur le dernier mot comme pour lui rappeler qu’il faisait partie de cette famille et qu’il en ferait toujours partie quoi qu’il fasse.

- C’est bien dommage que vous vacances se soit déroulées de la sorte cependant si j’étais vous je me montrerais plus compréhensif avec les autres sorciers. Pensez à votre nom, votre visage, votre ascendance, pensez à tout ce que vous représentez pour eux. Je conçois que vous n’êtes pas responsable des crimes de vos parents mais vous êtes un Lestrange. Vous ne pouvez pas cracher sur votre histoire et votre famille…

*... Et un jour où l’autre tu deviendras forcément comme tes parents *, songea-t-il amèrement.

Son regard s’attarda sur le visage du jeune homme. Julien avait l’air furieux et sa colère le faisait encore plus ressembler à son père. Anthony ne put retenir un frisson. S’il était né ailleurs peut être aurait-il pu devenir quelqu’un de bien mais là c’était impossible. Rien de bon ne sortait d’une famille de mangemort aussi démente.

La tension était de nouveau palpable. Anthony sentait que Julien allait répliquer et il le fixa intensément comme pour le mettre au défi. Même si l’année n’avait pas commencée officiellement, ce serait une très mauvaise idée d’agresser un professeur verbalement.

- Je reconnais que vous n'avez pas eu de chance en naissant dans cette famille mais c'est comme ça et il va falloir vous y faire, conclut Greenfield.

Julien apprit donc que le vieux Fergus, oo « Gugus » comme il était surnommé par ses élèves, serait remplacé par un ancien auror. Les cours de défense contre les forces du mal allaient donc en principe être plus captivants, de quoi redonner le sourire à n’importe qui, mais pas à Julien qui savait qu’il devrait se coltiner Greenfield encore toute l’année.

Enfin, le professeur de métamorphose en vint à ce pourquoi il ne l’aimait pas. Julien l’avait toujours su, c’était à cause de son nom de famille. Les Lestrange avaient été vénérés, puis craint et enfin détestés durant les périodes où le Seigneur des Ténèbres disparaissaient. Maintenant que plus de la moitié de la famille croupissait en prison, ce célèbre nom était devenu un nom que l’on vomissait.

« Vous êtes en train de me dire que vous, professeur de métamorphose et directeur de serpentard, donc que certains de vos élèves sont des fils et filles de mangemort, vous avez des préjugés sur vos élèves c’est ça ? »

Il se demandait comment réagirait le vieux Croutamitous s’il apprenait le comportement de son cher professeur de métamorphose. Un enseignant modèle ne devait-il pas prodiguer le même enseignement à tous ses élèves et les traiter avec justice ? Ca ne semblait pas être le cas de cet enseignant. Tiens d’ailleurs le jeune homme eut une idée… très méchante qui ne plairait pas à Greenfield. Il allait tenter de rentrer dans le journal de l’école et publierait un témoignage sur l’enseignant.

*On va bien voir quelle tronche tu feras !*

« Et pourtant ça n’a pas l’air de déranger les autres enseignants que je m’appelle Lestrange ? C’est bizarre qu’un simple nom vous fasse cet effet là. Franchement monsieur, entre nous, de quoi vous avez peur ? Vous voyez bien que je déteste toute ma famille et que je ne suis pas intéressé par la magie noire, sinon le choixpeau ne m’aurait pas envoyé à Gryffondor. Il est temps de balayer les dégâts de la guerre contre Vous-Savez-Qui ! »

Même s’il ne supportait pas son professeur de métamorphose ces dernières paroles étaient sincères. Il ne comprenait pas que lorsque l’on enseigne à de jeunes générations on soit autant plongé dans le passé, c’était inconcevable pour un jeune cerveau comme le sien.

Anthony n'avait jamais su cacher ses émotions. C'était un homme honnête, franc, qui ne savait pas faire semblant. Quand il avait quelque chose à dire il le disait et quand il ressentait quelque chose c'était clairement affiché sur son visage. Et en ce moment ses traits étaient déformés par l'indignation et la colère. Jamais encore un élève ne lui avait parlé comme ça. Julien lui faisait la leçon comme si les rôles étaient inversés et que c'était lui l'élève. C'était tout bonnement insupportable ! Et le pire dans tout ça c'est qu'Anthony savait au fond, tout au fond de lui même, que Julien avait raison. On ne pouvait juger quelqu'un sur son nom, sa maison et son apparence. Mais le professeur était bien trop fier et têtu pour l'admettre et à 40 ans il était trop tard pour changer.

Le visage rouge Anthony lâcha le le livre qu'il tenait encore sur ses genoux et sortit sa baguette de sa poche. Il se leva brusquement et jeta un coup d'oeil à travers la porte vitrée du compartiment. Des élèves circulaient dans le couloir et il n'avait aucune envie qu'on entende leur conversation. Il marmonna un sort d'isolement pour que les bruits et les sons ne sortent pas du compartiment.

- Si c'est ce que vous voulez, fulmina Greenfield, je vais être tout à fait franc avec vous. Oui je suis directeur de Serpentard et oui j'ai de nombreux enfants de mangemorts dans ma maison. Ce sont généralement des enfants orgueilleux, sans éducation et sans scrupules mais ce n'est pas parce que je suis leur directeur que je les laisse faire ce qu'ils veulent. Je me moque de la maison ou de l'année, l'enfant d'un mangemort reste un individu qui a vécu et grandit avec des serviteurs du seigneur des ténèbres et je me méfie d'eux comme de la peste.

Sa gorge se serra et il s'en voulut de se laisser emporter comme ça. D'habitude il était plus calme, plus mesuré. Il se força à respirer profondément.

- Vous trouvez bizarre qu'un nom me fasse cet effet ? Vous trouveriez ça moins étrange si vous aviez vécu ne serait-ce que le tiers de ma cavale. Et la maison ça ne veut rien dire. Je suis d'origine moldue et pourtant j'ai été à Serpentard. Je n'avais ni le sang, ni les préjugés requis pour aller là-bas mais mon caractère collait avec cette maison. Les Gryffondor ne sont pas tous des saints sans défauts et les Serpentards ne sont pas tous des imbéciles prétentieux.

Bon d'accord la majorité était comme ça mais il y avait quelques exceptions. Et à l'époque où il était élève il faisait partie de ces exceptions. Anthony n'aimait ni l'humiliation, ni la méchanceté gratuite, ni l'orgueil déplacé. Lui même était fier, fier d'être ce qu'il était et fier de son parcours, mais pas orgueilleux ni prétentieux. Sauf peut être avec quelques rares personnes dont une qui se tenait devant lui.

- Il est temps de balayer les dégâts de la guerre contre Vous-Savez-Qui ! , conclut Julien.

Anthony observa son élève avec perplexité. C'était difficile à admettre mais le jeune homme faisait preuve d'une grande maturité. Bien sûr il avait raison, il fallait tourner la page et reconstruire. Seulement voilà il avait du mal à oublier, du mal à effacer la peur qui l'avait hantée pendant huis mois : La peur de se faire attraper, de voir sa femme ou ses enfants kidnappés, de les voir souffrir ou pire mourir. Heureusement il ne leur était rien arrivé mais Anthony se souvenait toujours de la terreur et des pleurs de ses mômes qui étaient âgés de 7 et 10 ans à l'époque. Tout ça c'était la faute des mangemorts et tant qu'il ne les aurait pas vu souffrir en retour il aurait du mal à tourner la page.

Tous ses souvenirs le frappèrent comme un cognard à pleine vitesse. La colère disparut de son visage en un instant. Le trouble se lisait dans son regard et il se laissa retomber mollement sur le fauteuil. Son obstination l'empêchait d'admettre que Julien avait raison mais il lui lança un regard un peu désolé.... avant de se rappeler qu'il portait le nom de ses pires ennemis. Anthony expira puis conclut :

- Je regrette Julien.

Le professeur avait délibérément omis son nom de famille. Son ton était froid, sec, comme lorsqu'on clos un débat. Il savait qu'il y avait diverses manières d'interpréter cette phrase mais il laissait le jeune homme juger librement.

Greenfield commençait à virer au rouge tomate et le jeune homme se retint d’éclater de rire. Il fut cependant plus impressionné lorsque l’enseignant lâcha son bouquin et sortit sa baguette magique. Croyant dans un premier temps que celui-ci allait s’en servir pour clouer définitivement le bec du gryffondor il fut soulagé lorsqu’il vit le directeur de serpentarde s’en servir pour insonoriser le compartiment.

L’enseignant expliqua alors qu’il se méfiait de ses propres élèves, surtout les filles et filles d’anciens mangemort et qu’il les fuyait comme la peste. Bon au moins il le reconnaissait, mais devant de tels propos le jeune homme se demandait pourquoi avoir choisi d’être directeur de cette maison alors qu’il aurait eut plus sa place à serdaigle par exemple.

Après une profonde inspiration il déclara que s’il avait été en cavale il aurait détesté ce nom. Julien baissa les yeux.

« Mais qu’est-ce que j’y peux moi ? »

Il avait dit ce qu’il ressentait au plus profond de lui-même ; qu’Est-ce qu’il y pouvait ? Jamais il n’avait cautionner les actes monstrueux des membres de sa famille, jamais il n’avait assisté aux réunions de familles, jamais il n’avait lancé encore un seul sortilège de magie noir de sa vie, si courte fut-elle pour le moment.

L’enseignant expliqua alors qu’il regrettait. Julien leva les yeux au plafond.

« Vous regrettez quoi ? Vous regrettez de m’avoir fait subir deux ans de calvaire dans votre classe juste parce que je m’appelle Lestrange ou vous regrettez parce que quoi que je fasse vous me détesterez ! J’ai le droit d’avoir une vie par les bourses de Merlin, j’ai le droit d’aller en cours sans avoir un mal de ventre épouvantable ! Qu’est-ce qu’il faut pour que je sois heureux ? Que je change de visage et de nom et que je parte très loin d’ici ? Non l’Ecosse c’est chez moi et je n’ai pas envie de changer parce que mes parents ont adoré une pratique que je hais par-dessus tout ! »

Il se leva alors, alla fermer les rideaux du compartiment, se mit dos à l’enseignant et enleva son t-shirt d’un seul geste. Là sur son dos on pouvait nettement voir des traces de coups de fouet. Elles étaient nombreuses et devaient remonter à deux trois ans mais elles étaient encore bien visibles, rappelant à Julien le malheur qu’il avait eut d’avoir de tels parents.

« C’est le traitement que je recevais quotidiennement, surtout les dernières années ! Lorsque j’ai refusé de me prêter à la cérémonie d’initiation qui devait faire de moi un mangemort ma mère est devenue folle. Je crois que ça l’a encore plus secouée que mon père. Tous deux avaient de très bons fouets et ils les testaient sur leur propre fils… Je… je n’ai jamais parlé de ça à personne. »

Il remit son t-shirt et retourna rapidement se rasseoir. Il mit alors sa tête entre ses deux mains et attendit que l’enseignant vienne briser le silence.

[HJ: J'adore ton message ! Il est vraiment super ^^ En plus tu m'as bien faire rire avec les "bourses de Merlin" mdr]



Est-ce qu'en montant dans le train Greenfield s'était imaginé une seconde qu'un adolescent de 16 ans allait lui faire la leçon ? Non. Est-ce qu'il avait envisagé la possibilité de se sentir bête et honteux devant un fils de mangemort ? Encore moins. Mais tout ça n'était rien comparé à ce qu'il venait de vivre : Julien Lestrange, l'étudiant qu'il aimait le moins, s'était confié à lui. Jamais au grand jamais il n'aurait pu prévoir cette situation. Et si une voyante le lui avait annoncé Anthony lui aurait rit au nom en la traitant de charlatan. Comment en étaient-ils arrivés là ? Il n'en était plus sûr. Une provocation, une réplique acerbe, un éclat de colère... au final ils s'étaient déballés toute leur vie en laissant libre cours à leur frustration.

A présent le professeur était gêné, extrêmement gêné.... surtout après la vision de ses affreuses cicatrices. Il les avait observés avec un mélange d'horreur et de pitié avant que Julien ne rabaisse son tee-shirt brusquement. Jamais encore il n'avait vu des marques de la sorte. Bien évidemment il savait que des enfants étaient battus partout dans le monde mais c'était la première fois qu'il en rencontrait un... et qu'il découvrait les conséquences d'un tel traitement. C'était vraiment immonde. Comment un parent pouvait-il faire ça à son enfant ? Le propre fruit de ses entrailles ! Comment un être humain pouvait-il infliger ça à la chaire de sa chaire ? Ce n'était pas possible.... à moins d'être un monstre. Mais c'est exactement ce qu'étaient les Lestranges : des monstres. Restait à savoir si Julien était pareil.

Anthony releva la tête et découvrit que l'adolescent avait enfouit la sienne dans ses mains. Est-ce qu'il pleurait ? Est-ce qu'il s'était perdu dans de sombres pensées ? Pendant un instant il faillit poser une main réconfortante sur son épaule mais il se rétracta au dernier moment. Il ne se sentait pas encore prêt pour ça. Et puis qui sait comment le jeune homme réagirait ? Après tout ce qu'il lui avait fait endurer il aurait été normal qu'il le repousse. Anthony se renfonça donc dans son fauteuil et chercha quelque chose à dire. Il fit tourner ses méninges à fond mais son esprit resta vide. Que dire à un ado qui vient de vous montrer ses blessures ? Qu'on est désolé ? C'était stupide et ça n'avançait à rien. Ce fut pourtant les premiers mots qui sortirent de sa bouche.

- Je... je suis navré.... je.... je n'imaginais pas que.... tout ça....

Décidément Julien avait fait fort ! Lui qui était d'habitude si assuré ne trouvait plus ses mots. Il balbutiait, se frottait le front machinalement et évitait le regard du jeune homme à tout prix.


- Je .... je vous déteste c'est vrai.... injustement. Parce que vous portez un nom que je n'aime pas. Ce n'est pas un comportement convenable.... au contraire.

Attention notez bien la date : 1er Septembre 2000. Jour où Anthony Greenfield, professeur de métamorphose et ex-serpentard, a enfin admit qu'il avait tord devant un élève. Pour sûr que ce n'était pas tous les jours. Julien pourrait au s'en vanter à Poudlard ! Non pitié pas ça, c'était le meilleur moyen d'être la risée de tous. Anthony avala sa salive avec un petit raclement de gorge. Et maintenant ? Une perle de sueur glissa le long de son front. Imaginez à quel point il était mal à l'aise !


- Je.... je ne peux malheureusement pas tirer un trait sur tout ça en un quart d'heure mais je m'engage solennellement à faire des efforts. Et je vous prie d'accepter mes excuses.

Anthony releva enfin la tête pour affronter le regard de son élève. Il s'attendit à une nouvelle explosion, à une réplique acerbe, à une humiliation peut être. Rien ne l'obligeait à l'excuser et encore moins à croire sa promesse. Seulement voilà le professeur ne pouvait pas changer en un claquement de doigts. Il fallait se forcer. Toutes ces choses étaient profondément ancrées en lui et il lui faudrait du temps. Combien ? Il ne savait pas exactement. Peut être quelques semaines, peut être quelques mois... et un jour enfin il réussirait à tout oublier pour aller de l'avant. Et il ne jugerait plus les gens sur leur noms ou leur origines. En attendant cette date il faudrait le prendre comme il était, avec ses bons et ses mauvais côtés.

Son regard s'attarda sur le visage du garçon, en quête d'une réaction. Il repensa à son dos, à ses cicatrices et soudain une idée traversa son esprit. Avant que le jeune homme n'ouvre la bouche pour répondre Anthony lança :


- Et à propos de ces marques, je sais que cela ne me regarde absolumment pas mais je connais quelqu'un qui pourrait vous aider.... si vous le souhaitez.

Le gêne s'installa de nouveau dans le compartiment. Julien allait encore l'envoyer paître, ce qui était bien normal en fait puisqu'il se mêlait de ses affaires. Il tenta de cacher tant bien que mal son malaise et fixa son élève, prêt à encaisser les répliques mordantes.



[HS: Désolée c'est pas top. Je te propose que tu réponde et que je mette un terme au RP après pour pas que ça traîne en longueur... enfin c'est comme tu le sens]

Comme il s'y attendait, la première réaction de Julien fut expéditive. Son ton était méprisant, son visage était imprégné de ressentiment et il lança un regard dégoûté à son enseignant. En temps normal Greenfield ne se serait pas laisser traiter de la sorte mais cette fois c'était différent... Les images du dos de Julien hantait encore son esprit et aussi têtu soit-il, il n'était pas aussi insensible qu'il paraissait. Il avait un coeur et une morale. Il ne pouvait pas faire semblant de n'avoir rien vu et continuer à rabaisser cet enfant. Enfant qui, au passage, avait subit la pire des calomnies aux yeux d'Anthony : Etre battu par ses propres parents.

Le professeur baissa donc la tête et laissa son élève se défouler. Ca faisait mal d'entendre tout ça mais c'était nécessaire, il le savait bien. Nécessaire pour tourner la page et devenir quelqu'un de meilleur. Il écouta Julien jusqu'au bout puis s'excusa platement. Greenfield vit passer un air étonné sur le visage de son étudiant. Pourvu qu'il ne raconte pas ça à tout le monde ! Il ne manquerait plus que d'autres élèves de Poudlard viennent lui faire une scène pour obtenir des excuses. A cette pensée il grimaça et son teint devint un peu plus terne.... Jusqu'à ce que Lestrange parle de la métamorphose. Cette fois-ci c'est Greenfield qui retint un sourire. La métamorphose n'était pas sa tasse de thé ? Sans blague ! En deux ans il avait eu le temps de le remarquer. Julien n'était vraiment pas doué pour cette matière et ça ne s'améliorait pas avec le temps. Bon d'accord, peut être qu'Anthony le sous-notait un peu à cause de son nom de famille mais au final ce n'était jamais loin de la note qu'il méritait. Et même si le professeur avait promis de faire des efforts, il n'allait pas le sur-noter juste pour lui faire plaisir et se réconcilier avec lui. Il rétorqua donc un simple :

- J'espère que vous progresserez.

Pour toute réponse le Gryffondor se leva et Anthony comprit qu'il allait partir. C'était un soulagement après l'intense quart d'heure qu'ils avaient vécus. Il le regarda prendre ses affaires et soudain une idée lui traversa l'esprit. Sans savoir pourquoi, il lui proposa de lui présenter quelqu'un pour ses blessures. Julien refusa poliment et se dirigea vers la porte du compartiment.

« Euh… Merci quand même. »

Cette phrase accompagnée d'un bref sourire rendit toute sa méfiance à Anthony. Pourquoi le remerciai-t-il ? Après tout ce qu'il lui avait fait subir il devrait plutôt le détester. Ca cachait forcèment quelque chose de louche... Tout à coup il se rendit compte qu'il était de nouveau en train de sombrer dans la paranoïa anti-mangemorts. Non, non, non, il avait promit de faire des efforts ! Il secoua la tête et se leva à son tour. Il avait besoin d'eau, d'air frais, et de quelques friandises. Il pourrait surement trouver la vendeuse et son chariot dans le couloir. Il lança un sort de protection à sa valise, au cas où quelqu'un essayerait de farfouiller dedans, puis il sortit du compartiment.